Patrimoine

La Fondation des Artistes administre un patrimoine important (édifices historiques, parcs et jardins, œuvres d’art, archives), conservé tant à Paris qu’à Nogent-sur-Marne. Ce patrimoine est actuellement reconnu grâce au classement au titre des Monuments Historiques de l’Hôtel Salomon de Rothschild, à l’attribution du label « Patrimoine d’intérêt régional » pour l’ensemble du site de Nogent-sur-Marne et au classement de son parc comme site pittoresque. La Fondation des Artistes a de plus rejoint l’ICOM (Conseil International des Musées) en 2016.

PARIS

Au cœur du 8e arrondissement de Paris, la Fondation des Artistes a installé son siège dans l’Hôtel Salomon de Rothschild, offert en 1922 par la baronne Adèle de Rothschild pour aider la cause des artistes contemporains.

 

De la Folie Beaujon à l’Hôtel Salomon de Rothschild

L’Hôtel Salomon de Rothschild est édifié sur le terrain qui accueillait précédemment la Folie Beaujon, domaine de villégiature construit pour Nicolas Beaujon entre 1781 et 1786 par l’architecte Nicolas-Claude Girardin. Dans un parc de douze hectares et autour du pavillon d’habitation appelé la chartreuse, se trouvaient plusieurs petites fabriques, un appartement des bains, ainsi qu’une chapelle, dont le portique actuellement visible dans le jardin privé de l’hôtel est le seul vestige. Après la mort de Nicolas Beaujon en 1786, le domaine est divisé en plusieurs parcelles, dont l’appartement des bains acheté par Honoré de Balzac en 1846, afin de pouvoir y recevoir la comtesse polonaise Eveline Hanska. Mais Balzac ne profite pas longtemps de cette demeure où il s’éteint en 1850, quelques mois à peine après son retour de Pologne où il venait d’épouser Madame Hanska. Sa veuve continue à habiter la maison jusqu’en 1882, date à laquelle elle vend avec bénéfice d’usufruit la propriété à sa nouvelle voisine, la baronne de Rothschild, avant de mourir trois mois plus tard. Adèle de Rothschild documente les espaces insalubres qui sont par la suite détruits et fait édifier une rotonde en hommage à l’écrivain.

Dix ans après la mort de son mari, la baronne de Rothschild acquiert différentes parcelles de l’ancienne Folie Beaujon et fait édifier, entre 1874 et 1878, un hôtel particulier par l’architecte Léon Ohnet, remplacé après son décès par son élève Justin Ponsard. Inspiré par l’architecture de la seconde moitié du XVIIIe siècle, l’édifice est construit entre une cour imposante et un jardin à l’anglaise d’un hectare, aujourd’hui ouvert au public. Ses intérieurs, également dans le goût du siècle des Lumières, présentent sur deux niveaux une succession de salons ornés de plafonds peints par Léopold de Moulignon. D’autres espaces sont plus typiques de l’art du XIXe siècle, tels que le grand hall dont l’impressionnante verrière culminant à onze mètres de hauteur est une référence à l’invention relativement récente de l’architecture en fonte et verre.

 

Le Cabinet de curiosités de l’Hôtel Salomon de Rothschild

L’Hôtel Salomon de Rothschild abrite également le Cabinet de curiosités qui est, avec la Rotonde Balzac, la dernière pièce de la demeure à conserver la totalité de son décor d’époque, comme l’avait souhaité Adèle de Rothschild. Petit salon de quarante mètres carrés, ce cabinet de curiosités est l’écrin de plus de quatre cents œuvres d’art rassemblées par Salomon et Adèle de Rothschild. Le statut éminemment artistique du lieu est symbolisé par son riche décor de vitraux anciens, par des cuirs dorés qui garnissent les murs et une tapisserie du XVIIe siècle qui orne le plafond. A l’intérieur, des vitrines conservent des collections datées entre l’Antiquité et le début du XXe siècle, et provenant principalement d’Europe, d’Asie et d’Orient. Parmi les objets se trouvent un ensemble important de jades chinois sculptés, de la porcelaine ancienne, des armes occidentales et orientales, mais aussi des sculptures de la Renaissance et du XIXe siècle, comme L’orpheline Alsacienne d’Auguste Rodin. Des tableaux et dessins du XIXe siècle, exécutés par Eugène Delacroix, Ary Scheffer, Alexandre-Gabriel Decamps ou Eugène Lami, sont également exposés autour de ce cabinet de curiosités, dernier en France des demeures Rothschild.

Depuis 2017, le cabinet de curiosités est ouvert à la visite sur inscription.

Visiter le Cabinet de curiosités

Dans le cadre du programme « Les collections Rothschild dans les institutions publiques françaises », l’Institut national d’histoire de l’art (INHA) et la Fondation des Artistes se sont associés pour mettre en valeur les œuvres du Cabinet de curiosités de l’Hôtel Salomon de Rothschild :

https://collections.rothschild.inha.fr/fr/institutions/cartographie-des-etablissements/partenaires/paris-fondation-des-artistes.html

 

La collection du baron et de la baronne Salomon de Rothschild

La baronne Adèle de Rothschild a légué une partie de ses collections à de grandes institutions françaises : le Musée du Louvre, le Musée national du Moyen Âge (Cluny), le Musée des Arts décoratifs et la Bibliothèque nationale de France. Les autres œuvres, confiées à la Fondation Salomon de Rothschild – depuis baptisée Fondation des Artistes –, sont en partie exposées dans le Cabinet de curiosité et au Musée du Louvre (Départements des Objets d’art et des Arts de l’Islam), au Mobilier national (meubles, tapis et objets) ou au MAD – ancien Musée des Arts décoratifs – (porcelaines et émaux chinois ; objets d’art du XVIIIe siècle).
Le deuxième tome de la trilogie dirigée par Pauline Prevost-Marcilhacy et consacrée aux œuvres d’art acquises par la famille Rothschild offertes à des institutions françaises rassemble de nombreux chapitres étudiant plus avant les collections du baron et de la baronne Salomon de Rothschild :
Les Rothschild : une dynastie de mécènes en France, sous la direction de Pauline Prevost-Marcilhacy, éditions du Louvre, Bibliothèque nationale de France éditions, Somogy éditions d’art, Paris, 2016, prix Bernier de l’Académie des Beaux-Arts (2016)

 

NOGENT

Au sein d’un grand parc à l’anglaise de dix hectares, le domaine de la Fondation des Artistes à Nogent-sur-Marne est constitué de plusieurs édifices datés entre le XVIIe et le XXe siècle et réunis ensemble par la famille Smith, qui l’a légué à l’Etat en 1944.

 

Le 14 rue Charles VII : la Maison nationale des artistes

Au XVIIe siècle et alors que le village de Nogent-sur-Marne commence à attirer aristocrates et bourgeois parisiens qui y recherchaient une retraite de villégiature, les deux parcelles allongées de l’actuelle rue Charles VII sont transformées pour accueillir chacune un parc et un château. Des deux demeures, celle du 14 rue Charles VII (aujourd’hui la Maison nationale des artistes) est la plus récente : elle est mentionnée pour la première fois en 1665, alors qu’elle était aux mains du baron de Soucy, premier de ses quatorze propriétaires successifs. Le plan massé typique des châteaux de villégiatures franciliens et le fronton triangulaire percé d’un oculus qui orne la façade évoquent aujourd’hui la forme du château sous l’Ancien Régime. En 1860, la demeure et son parc sont achetés par Jules et Anne-Léontine Smith, qui entament sa rénovation, en édifiant notamment le bel escalier à double révolution donnant sur le jardin. Après la mort d’Anne-Léontine en 1912, sa fille Jeanne Smith s’installe définitivement dans cette maison jusqu’à son décès en 1943. La transformation du château en maison de retraite pour artistes, à partir de 1945, a profondément modifié la distribution intérieure, mais subsistent encore trois salons de réception en enfilade, qui ont conservé leurs moulures de stuc dans le goût Louis XV, leur parquet en point de Hongrie et leurs cheminées de marbre du XVIIIe siècle.

Visiter la Maison nationale des artistes

 

Le 16 rue Charles VII : la MABA

Cité dans les archives dès 1642, le château du 16 rue Charles VII (aujourd’hui la MABA) est le plus ancien du domaine de Nogent-sur-Marne. La propriété accueillera dix-sept occupants successifs entre le XVIIe et le XIXe siècle, parmi lesquels Louis Camus des Touches, père du célèbre auteur de L’Encyclopédie d’Alembert, l’Abbé de Pomponne ou l’homme d’affaire de la comtesse du Barry, qui sera guillotiné avec elle en 1793. Tout comme la demeure mitoyenne, le château du 16 rue Charles VII suit un plan massé sur trois niveaux, dont le premier est orné de pierres meulières. Au centre de la façade, la porte cintrée ornée de victoires en bas-reliefs est surmontée d’un fronton triangulaire. Après le décès de son époux, Anne-Léontine Smith et son frère Auguste Lesouëf achètent le château et son parc en 1895. Le massif boisé qui séparait les deux demeures est alors abattu et les deux jardins sont transformés en un parc à l’anglaise. Madeleine Smith-Champion s’installe dans cette maison avec son époux Pierre Champion en 1912. Dès août 1914, les sœurs Smith s’engagent pleinement dans l’effort de guerre en transformant la demeure de Madeleine en hôpital militaire, connu sous le nom d’Hôpital Auxiliaire n° 73. Ce dispensaire médicalisé (salle de chirurgie moderne, pharmacie, pavillon d’isolement pour les malades contagieux…) était totalement à la charge financière des Smith-Champion et put accueillir jusqu’à soixante blessés simultanément. L’hôpital reçut la visite du Président Poincaré, le 1er avril 1916 et Madeleine Smith-Champion fut décorée de la Légion d’honneur en 1920 en remerciement des services rendus pendant la guerre.

Rénové en 2006 pour accueillir un centre d’art, le château présente aujourd’hui un espace d’exposition moderne, à l’exception de son vestibule qui conserve toujours son décor d’origine, composé de pilastres ioniques au-dessus desquels sont disposés des bas-reliefs datables du début du XVIIIe siècle, représentant des trophées de guerre ainsi que le passage du Rhin.

Visiter la MABA

 

La Bibliothèque Smith-Lesouëf

En 1906, le frère d’Anne-Léontine Smith, le célèbre bibliophile Auguste Lesouëf décède, léguant à sa sœur et ses nièces la totalité de sa collection constituée de 18 000 ouvrages dont de très rares manuscrits et incunables. Après le décès de leur mère en 1912, les sœurs Smith décident de léguer la collection à la Bibliothèque nationale de France et de faire construire un édifice pour conserver ces ouvrages. Le chantier, étalé entre 1913 et 1917, est confié à Théodore Dauphin et à son gendre Paul Marion. Sur les conseils de Pierre Champion, la façade de brique et son haut toit d’ardoise font référence à l’architecture Louis XIII. En raison de la difficulté à trouver des matériaux en période de guerre, les boiseries et ferronneries intérieures sont récupérées au sein d’édifices plus anciens comme l’Hôtel des Conseils de guerre ou le couvent des Filles de l’Assomption à Paris. Malgré son apparence ancienne, la Bibliothèque comporte des dispositifs novateurs tels que des plafonds zénithaux en pavés de verre qui permettent de faire entrer la lumière dans les trois niveaux d’élévation, tout en préservant les ouvrages rares. L’édifice ouvre ses portes au public en 1919 sous le nom de « Bibliothèque Smith-Lesouëf » et sera occupé par la Bibliothèque nationale de France jusque dans les années 1980, date du déménagement des collections vers les réserves centrales. Le bâtiment conserve aujourd’hui les livres ayant appartenus aux anciens résidents de la Maison nationale des artistes, ainsi qu’un ensemble de meubles et objets d’art (miniatures, meubles, santons, dessins ou sculptures) d’Auguste Lesouëf, déposés à la Fondation des Artistes par la Bibliothèque nationale de France.

 

Le parc à l’anglaise de Nogent-sur-Marne

Alors que le jardin du 16 rue Charles VII semblait déjà avoir subi cette modification au milieu du XIXe siècle, les Smith transforment dès 1861 le parc de la maison mitoyenne en jardin à l’anglaise, caractérisé par une nature savamment désorganisée. En 1895, les deux espaces sont rassemblés pour constituer un grand parc de dix hectares, situé entre la rue en partie supérieure et la Marne en partie inférieure, et classé site pittoresque en 1909. Les essences principales sont les frênes, érables sycomores, pins, hêtres et tilleuls. On peut aussi y admirer des arbres plus rares comme un févier d’Amérique, un frêne pleureur, un sophora du Japon ou un arbre de Judée ainsi que des sujets remarquables tels que le pin noir d’Autriche ou un peuplier noir d’Italie. Outre ses arbres majestueux, le parc est aussi composé d’une prairie. Le jardin comporte également deux fabriques du XIXe siècle : un pigeonnier et l’ancienne maisonnette des vachers construite dans un style pittoresque avec des colombages rustiques, qui est actuellement un atelier de lithographie.
Depuis 1999, la Fondation des Artistes met à disposition une partie du parc à la Confrérie du Petit Vin Blanc de Nogent, qui y a replanté 450 pieds de vigne de cépage Chardonnay, permettant de produire à nouveau le traditionnel « petit vin blanc du Val-de-Marne », qui a fait la renommée des guinguettes locales au début du XXe siècle.

Visiter le parc

 

En plus des oeuvres léguées par la Baronne de Rothschild, la Fondation des Artistes conserve deux ensembles d’œuvres d’art liées à l’histoire des sœurs Smith et à celle des artistes accompagnés par la Fondation, visibles sur rendez-vous et susceptibles d’être prêtées ou déposées dans des musées.

 

La collection Smith-Champion

La Fondation des Artistes conserve plus de cent quarante tableaux et dessins de Madeleine Smith s’étalant entre 1879, alors qu’elle n’avait que quinze ans, et son décès en 1940. Il s’agit principalement de paysages, dont de nombreuses esquisses du parc de Nogent-sur-Marne, mais également d’une trentaine de portraits, plus de vingt nus féminins datés à partir de 1905, de scènes de genre caractéristiques de sa production à la fin du XIXe siècle ou témoignages de la Première Guerre mondiale.
La peintre a également légué à la Fondation, qu’elle a contribué à créer, sa collection personnelle, constituée d’abord d’oeuvres exécutées par ses maîtres. Sont ainsi conservés sept toiles de Jean-Jacques Henner, dont trois portraits de Madeleine Smith datés entre 1895 et 1900 ; mais aussi deux huiles de Raphaël Collin et huit œuvres d’Ottilie Roederstein, peintre suisse qui fut l’élève de Henner avec Madeleine, avant de devenir sa professeure et la compagne de sa sœur, Jeanne Smith, pendant quelques temps.
Dix albums contenant des épreuves photographiques originales prises par Jeanne Smith entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle témoignent également de la production photographique de Jeanne au sein de la collection de la Fondation des Artistes. Un fonds d’estampes anciennes d’après Antoine Watteau, Gautier-Dagoty, Ter Borch ou Claude Mellan complète la collection Smith-Champion léguée à la Fondation.

 

La collection des anciens résidents de la Maison nationale des artistes

La Fondation des Artistes préserve un autre fonds artistique constitué par des dons et legs d’œuvres d’art (principalement des peintures, dessins, estampes et photographies, mais aussi des sculptures et quelques objets d’art) exécutées par des résidents de la Maison nationale des artistes ou provenant de leur collection personnelle, telle que les masques africains rassemblés par l’artiste Homero Panagiotopulos. D’autres créateurs, aidés par la Fondation des Artistes, ont également souhaité offrir des œuvres.
Cet ensemble, qui comprend aujourd’hui plus de 1 400 numéros d’inventaire, est un témoignage majeur de la riche histoire de la Fondation des Artistes, mais également de la diversité de la production artistique entre la fin du XIXe siècle et notre époque. Parmi les trois cents artistes présentés dans la collection, se trouvent ainsi quelques grands noms de la photographie (Willy Ronis), de la peinture (Georges et Auguste Leroux, Pierre Girieud, Maurice Mazo, Jacques Monory), de la sculpture (Paul Belmondo, Malvina Hoffman, Henri Pelée), de l’illustration (Paul Collin, André Édouard Marty, Jean-François Laglenne ou André Dignimont) ou de la décoration (Lucien Aguettand).