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MONGKUT

19 mars 201517 mai 2015

Artiste :
Arin Rungjang

Arin Rungjang s’est fait connaître par ses relectures historiques virtuoses qui recoupent la petite et la grande histoire, la multiplicité des époques, des lieux et des langues. S’intéressant plus particulièrement à certains aspects méconnus de l’histoire thaïlandaise et à leurs rapports avec le présent dans les sites et les contextes où il déploie sa pratique artistique, il focalise son travail sur des objets susceptibles de réunir des événements distants les uns des autres dans le temps et dans l’espace, et qui occupent une place centrale dans sa recherche.
Représentant la Thaïlande dans le cadre de la 55e Biennale de Venise, son travail intitulé Golden Teardrop explorait les adaptations transnationales d’un dessert thaïlandais réputé, mettant au jour des récits singuliers et des simultanéités inédites venant contredire l’idéologie officielle.

Avec Mongkut, œuvre présentée à l’occasion de la programmation Satellite 8, Arin Rungjang axe sa recherche sur une forme symbolique vénérée des Thaïlandais. Il y évoque les relations franco-siamoises qui se sont nouées pendant les règnes parallèles du roi Rama IV (1851-1868) et de l’empereur Napoléon III (1852-1870), une période marquée par l’expansion du colonialisme européen dans la majeure partie de l’actuel Sud-Est asiatique. Le Siam avait été auparavant, et ce durant des siècles, le royaume le plus riche et le plus puissant de cette région du monde. Soucieux de contrecarrer la colonisation de son pays, Rama IV mena une politique étrangère d’ouverture à l’étranger et d’accords commerciaux, grâce à laquelle il put concilier dans les faits les intérêts des impérialismes français et britannique et ceux de sa couronne. Le Siam demeura ainsi le seul pays de la région à échapper à l’expansionnisme colonial, ce qui est aujourd’hui en Thaïlande à la fois source de fierté et de débats.

Dans Mongkut, à la fois installation vidéo et sculpture, Arin Rungjang part d’une situation actuelle pour rouvrir un chapitre méconnu de la relative souveraineté du Siam. Rama IV, connu en Occident sous le titre de roi Mongkut (ce qui signifie « couronne » en thaï), a fait réaliser deux copies de sa propre couronne royale pour les offrir en guise de cadeaux diplomatiques aux souverains de Grande-Bretagne et de France. Le 27 juin 1861, la seconde réplique est présentée à l’empereur Napoléon III par une ambassade siamoise lors d’une cérémonie officielle qui s’est tenue au château de Fontainebleau.

La première vidéo réalisée par Rungjang illustre les somptueux décors du château et la mise en scène des collections dans une sombre lumière d’hiver. Elle est accompagnée par un commentaire de Pierre Baptiste, conservateur en chef du musée Guimet. Tandis que ce dernier se livre à un tour d’horizon de l’histoire des relations franco-siamoises, tout en évoquant les questions de la légitimité des cadeaux diplomatiques et de la présentation des collections, un jeune homme visite seul les salles du musée, jusqu’à parvenir à la réplique qui est exposée dans les salons de l’impératrice Eugénie. Se plaçant devant la vitrine abritant la couronne, il braque sur celle-ci un petit scanner 3D portatif.
La seconde vidéo fait le portrait de Woralak Sooksawasdi na Ayutthaya, l’arrière-arrière-arrière-petite fille du roi Mongkut. Maître artisan d’art et créatrice de couronnes de théâtre, elle a été nommée par l’actuelle reine de Thaïlande pour enseigner les arts royaux au Centre royal des arts et métiers populaires de Bang Sai, situé au nord de Bangkok. Cependant, aucun élève n’est inscrit à l’heure actuelle dans sa classe. Tandis que Sooksawasdi évoque tour à tour sa propre généalogie et le déclin de l’artisanat d’art royal, la caméra explore son atelier baigné dans une douce lumière tropicale. Entourés des instruments et matériaux de leur métier, Sooksawasdi et son époux consultent les données numériques enregistrées par le jeune homme au château de Fontainebleau. Ne tenant pas compte des possibilités de reproduction infinies que ces données recèlent, ils incarnent un savoir-faire artisanal. Rungjang nous laisse sur ces images qui illustrent un travail long et méticuleux et se contentent de faire allusion à l’objet qui en résultera. C’est dans l’exposition que nous découvrons le chef-d’œuvre achevé de Sooksawasdi, à savoir la réplique de 2015 de la réplique de 1861 de l’original de la couronne royale de Siam de la dynastie Chakri créée en 1782.

La complexité du continuum représenté par Mongkut perturbe la chronologie linéaire à laquelle nous sommes généralement habitués. Avec délicatesse, Rungjang aborde le pouvoir de négociation symbolique de l’objet en ne nous présentant délibérément qu’un pan de l’histoire de la souveraineté de la Thaïlande, passée et présente. Observée à la lumière du présent – avec un regard que l’artiste juge trop immédiat pour mettre au jour quelque preuve fiable –, l’ultime version de la couronne devient, selon Rungjang, un « miroir bipolaire ».
Erin Gleeson, commissaire de l’exposition.

Né en 1975 à Bangkok Arin Rungjang vit et travaille à Bangkok. Après un an passé, en 2000, aux Beaux-Arts de Paris dans l’atelier de Christian Boltanski, il a obtenu, en 2002, une licence des beaux-arts de la Silpakorn University. Expositions récentes : « Golden Teardrop », pavillon thaï de la 55e Biennale de Venise (2013) et 18e Biennale de Sydney (2012).

Exposition présentée dans le cadre de la programmation Satellite du Jeu de Paume.

 

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Arin Rugjang, "Mongkut", 2015. Installation. Double projection video HD 16/9, 14 min 30 s et 14 min 30 s. ©Arin Rungjang, 2015
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Arin Rugjang, tournage de "Mongkut", 2014. ©Arin Rungjang, 2015
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Arin Rugjang, "Mongkut", 2015. Installation. Double projection video HD 16/9, 14 min 30 s et 14 min 30 s. ©Arin Rungjang, 2015
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©Arin Rungjang, 2015

Détails

Début :
19 mars 2015
Fin :
17 mai 2015
Catégorie d’Évènement:

Lieu

MABA
Maison d'Art Bernard Anthonioz
16 rue Charles VII 94130 Nogent-sur-Marne, 94130 94130 France
Téléphone :
maba@fondationdesartistes.fr / t : 01 48 71 90 07
Site Web :
Ouvert au public les jours de semaine de 13h à 18h. Les samedis et dimanches de 12h à 18h. Fermeture les mardis et les jours fériés. Entrée libre.

Organisateur

<b> Commissaire : </b> <br> Erin Gleeson

Artiste :
Arin Rungjang

Arin Rungjang s’est fait connaître par ses relectures historiques virtuoses qui recoupent la petite et la grande histoire, la multiplicité des époques, des lieux et des langues. S’intéressant plus particulièrement à certains aspects méconnus de l’histoire thaïlandaise et à leurs rapports avec le présent dans les sites et les contextes où il déploie sa pratique artistique, il focalise son travail sur des objets susceptibles de réunir des événements distants les uns des autres dans le temps et dans l’espace, et qui occupent une place centrale dans sa recherche.
Représentant la Thaïlande dans le cadre de la 55e Biennale de Venise, son travail intitulé Golden Teardrop explorait les adaptations transnationales d’un dessert thaïlandais réputé, mettant au jour des récits singuliers et des simultanéités inédites venant contredire l’idéologie officielle.

Avec Mongkut, œuvre présentée à l’occasion de la programmation Satellite 8, Arin Rungjang axe sa recherche sur une forme symbolique vénérée des Thaïlandais. Il y évoque les relations franco-siamoises qui se sont nouées pendant les règnes parallèles du roi Rama IV (1851-1868) et de l’empereur Napoléon III (1852-1870), une période marquée par l’expansion du colonialisme européen dans la majeure partie de l’actuel Sud-Est asiatique. Le Siam avait été auparavant, et ce durant des siècles, le royaume le plus riche et le plus puissant de cette région du monde. Soucieux de contrecarrer la colonisation de son pays, Rama IV mena une politique étrangère d’ouverture à l’étranger et d’accords commerciaux, grâce à laquelle il put concilier dans les faits les intérêts des impérialismes français et britannique et ceux de sa couronne. Le Siam demeura ainsi le seul pays de la région à échapper à l’expansionnisme colonial, ce qui est aujourd’hui en Thaïlande à la fois source de fierté et de débats.

Dans Mongkut, à la fois installation vidéo et sculpture, Arin Rungjang part d’une situation actuelle pour rouvrir un chapitre méconnu de la relative souveraineté du Siam. Rama IV, connu en Occident sous le titre de roi Mongkut (ce qui signifie « couronne » en thaï), a fait réaliser deux copies de sa propre couronne royale pour les offrir en guise de cadeaux diplomatiques aux souverains de Grande-Bretagne et de France. Le 27 juin 1861, la seconde réplique est présentée à l’empereur Napoléon III par une ambassade siamoise lors d’une cérémonie officielle qui s’est tenue au château de Fontainebleau.

La première vidéo réalisée par Rungjang illustre les somptueux décors du château et la mise en scène des collections dans une sombre lumière d’hiver. Elle est accompagnée par un commentaire de Pierre Baptiste, conservateur en chef du musée Guimet. Tandis que ce dernier se livre à un tour d’horizon de l’histoire des relations franco-siamoises, tout en évoquant les questions de la légitimité des cadeaux diplomatiques et de la présentation des collections, un jeune homme visite seul les salles du musée, jusqu’à parvenir à la réplique qui est exposée dans les salons de l’impératrice Eugénie. Se plaçant devant la vitrine abritant la couronne, il braque sur celle-ci un petit scanner 3D portatif.
La seconde vidéo fait le portrait de Woralak Sooksawasdi na Ayutthaya, l’arrière-arrière-arrière-petite fille du roi Mongkut. Maître artisan d’art et créatrice de couronnes de théâtre, elle a été nommée par l’actuelle reine de Thaïlande pour enseigner les arts royaux au Centre royal des arts et métiers populaires de Bang Sai, situé au nord de Bangkok. Cependant, aucun élève n’est inscrit à l’heure actuelle dans sa classe. Tandis que Sooksawasdi évoque tour à tour sa propre généalogie et le déclin de l’artisanat d’art royal, la caméra explore son atelier baigné dans une douce lumière tropicale. Entourés des instruments et matériaux de leur métier, Sooksawasdi et son époux consultent les données numériques enregistrées par le jeune homme au château de Fontainebleau. Ne tenant pas compte des possibilités de reproduction infinies que ces données recèlent, ils incarnent un savoir-faire artisanal. Rungjang nous laisse sur ces images qui illustrent un travail long et méticuleux et se contentent de faire allusion à l’objet qui en résultera. C’est dans l’exposition que nous découvrons le chef-d’œuvre achevé de Sooksawasdi, à savoir la réplique de 2015 de la réplique de 1861 de l’original de la couronne royale de Siam de la dynastie Chakri créée en 1782.

La complexité du continuum représenté par Mongkut perturbe la chronologie linéaire à laquelle nous sommes généralement habitués. Avec délicatesse, Rungjang aborde le pouvoir de négociation symbolique de l’objet en ne nous présentant délibérément qu’un pan de l’histoire de la souveraineté de la Thaïlande, passée et présente. Observée à la lumière du présent – avec un regard que l’artiste juge trop immédiat pour mettre au jour quelque preuve fiable –, l’ultime version de la couronne devient, selon Rungjang, un « miroir bipolaire ».
Erin Gleeson, commissaire de l’exposition.

Né en 1975 à Bangkok Arin Rungjang vit et travaille à Bangkok. Après un an passé, en 2000, aux Beaux-Arts de Paris dans l’atelier de Christian Boltanski, il a obtenu, en 2002, une licence des beaux-arts de la Silpakorn University. Expositions récentes : « Golden Teardrop », pavillon thaï de la 55e Biennale de Venise (2013) et 18e Biennale de Sydney (2012).

Exposition présentée dans le cadre de la programmation Satellite du Jeu de Paume.

 

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Arin Rugjang, "Mongkut", 2015. Installation. Double projection video HD 16/9, 14 min 30 s et 14 min 30 s. ©Arin Rungjang, 2015
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Arin Rugjang, tournage de "Mongkut", 2014. ©Arin Rungjang, 2015
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Arin Rugjang, "Mongkut", 2015. Installation. Double projection video HD 16/9, 14 min 30 s et 14 min 30 s. ©Arin Rungjang, 2015
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©Arin Rungjang, 2015